HENRI CARTIER-BRESSON

Samedi je suis allée voir l’exposition Henri Cartier-Bresson qui se tient jusqu’au 9 juin au Centre Pompidou.
J’ai (re) découvert un artiste auquel auparavant je pouvais, au mieux, rattacher 1 ou 2 clichés, alors que connu dans le monde entier, il est considéré comme l’un des pionniers du photojournalisme moderne, mais pas que…..HCB, l’homme aux mille facettes….

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George Hoyningen-Huene / Henri Cartier-Bresson, New York, 1935 The Museum of Modern Art, Thomas Walther Collection, Purchase, New York

J’ai également découvert l’imposante organisation plastique de ses images et leur intensité dénuée de tout sensationnalisme, son anticonformisme à couvrir les événements et son refus de toute mise en scène.
En rentrant je me suis jetée attelée à la lecture de la biographie de Pierre Assouline, impatiente d’en connaître davantage sur l’artiste et j’ai également visionné Le siècle de Cartier-Bresson.
Article-fleuve aux nombreux raccourcis (salvateurs pour le lecteur qui aura le courage et l’envie d’aller jusqu’au bout) et non-exhaustif, afin de partager avec vous cette belle découverte. (Les phrases en italique et entre guillemets sont extraites du livre de Pierre Assouline).

Dès l’adolescence, la peinture est tout pour HCB. L’art sous ses différentes formes sera d’ailleurs la seule activité à laquelle l’adolescent s’adonnera avec rigueur et régularité, ses études seront plutôt médiocres. Pour faire plaisir à sa famille il passera trois fois le bac, sans l’obtenir, ruinant ainsi les espoirs de son père de voir son aîné reprendre la direction de l’entreprise familiale (Entreprise renommée de fils de coton). Oui mais voilà, Henri préfère peindre et quand il ne peint pas, il dessine. «Enfant, je peignais les jeudis et dimanches, et j’en rêvais tous les autres jours.»

Un apprentissage assidu, des aspirations personnelles et de nombreuses rencontres décisives forgeront son art photographique.
Lorsqu’il a 16 ans Jacques-Emile Blanche accepte qu’Henri viennent peindre chez lui et l’initie au monde de l’art.
Entre 1924 et 1926 il sera élève à l’académie Lhote, inconditionnel de Cézanne, où il apprendra les règles classiques de la géométrie & de la composition qu’il appliquera  à ses photographies.
Par l’intermédiaire de René Crevel il fréquentera les surréalistes à partir de 1926. Il assistera régulièrement aux réunions, toujours en bout de table, estimant être trop jeune pour participer aux conversations: « Il accompagnera sans adhérer », mais sa dette vis à vis du mouvement est grande, notamment son culte du hasard et des coïncidences. Il se ballade ainsi au hasard des rues dans l’espoir de capturer « d’heureuses coïncidences », comme ci-dessous où le vent fait bouger le nœud du rideau à l’endroit même où se situe la tête de l’homme qui lit le journal, faisant de lui « l’homme à la tête de nœud ».

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Livourne, Toscane, Italie, 1933 Épreuve gélatino-argentique, tirage réalisé dans les années 1980 36 x 24,3 cm Centre Pompidou, Musée national d’art moderne

Ou comme sur ce cliché pris derrière la gare Saint-Lazare en 1932 qui  est également un exemple emblématique de « l’instant décisif », concept qui a très longtemps défini son œuvre et cette capacité à capturer l’éphémère et le transitoire.

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Derrière la gare Saint-Lazare, Paris, France, 1932 Épreuve gélatino-argentique, tirage réalisé en 1953 49,8 x 35,1 cm Bibliothèque nationale de France, Paris © Henri Cartier-Bresson / Magnum Photos Courtesy Fondation Henri Cartier-Bresson

Finalement HCB  finit par en avoir assez du coté théoricien de Lhote , ajoutons à cela la fin d ‘une relation amoureuse,  et c’est dégoûté par ce monde, qu’ il part en Afrique en 1930.  Il y restera un an. Voyage très important car à l’époque il n’est pas encore photographe, mais il y prendra des photos aux angles inédits. Ce sera avant tout des photos de groupes, montrant des hommes en action, des corps en mouvement. Pas de vision ethnographique mais des instantanés de la vie quotidienne.

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IVORY COAST. 1931 © Henri Cartier-Bresson/Magnum Photo

A son retour à Paris il décide de devenir photographe et l’annonce à son père.
Une photo va l’impressionner au delà de tout. Il y aura un avant et un après, car ce cliché représente tout ce vers quoi il tend. Cette photo est signée Martin Munkascsi et représente 3 adolescents noirs vus de dos, s’élançant dans les vagues.

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Three Boys at Lake Tanganyika, ca. 1930 Martin-Munkacsi-1930

Elle bouleverse totalement HCB: « J’ai soudain compris que la photographie peut fixer l’éternité dans l’instant. C’est la seule photo qui m’ait influencé. Il y a dans cette image une telle intensité, une telle spontanéité, une telle joie de vivre…. ».

En 1932 il s’achète un Leica : « L’artiste a trouvé son instrument ».
Après une escapade à travers le vieux continent avec son ami d’enfance, un retour à Paris, un voyage d’un an au Mexique, un séjour à NY en 1935, il décide de changer de support, et de filmer plutôt que de photographier et retourne pour cela à Paris.
Il collabore ainsi avec Jean Renoir en tant qu’assistant sur le film « La vie est à nous » puis sur « Partie de campagne » où il apparaitra pour la première fois à l’écran et enfin sur « La règle du jeu ».
Il renouera avec la photo et la presse, tout d’abord car son récent mariage avec une danseuse indonésienne l’oblige à percevoir un un salaire régulier et, d’autre part, parce que la guerre civile espagnole le rappelle à l’actualité et à la menace du fascisme. « C’est Aragon qui, le premier, donne sa chance à HCB en l’engageant comme photographe à Ce soir. Un métier, un titre, un salaire. »

En mai  1937, il se voit confier un vrai grand reportage: le  couronnement du roi Georges VI  où il préfèrera photographier la foule déplacée en masse et capter ses regards plutôt que de photographier les cortèges et le faste.
Ces photos, et leur parti pris d’immortaliser la foule plutôt que de se consacrer à l’évènement officiel et au nouveau roi, sont parmi celles qui m’ont le plus interloquée pendant l’exposition. (Vous vous demandez ce que sont en train de faire ces gens? Le peuple londonien a regardé passer le cortège en lui tournant le dos et en utilisant des instruments optiques proches du périscope pour voir au dessus de la foule et ainsi mieux apprécier le spectacle.)

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Henri Cartier-Bresson. Couronnement de Georges VI, 1937, © Henri Cartier-Bresson/Magnum Photos

Durant cette même année, il réalisera un premier documentaire sur la guerre d’Espagne: Victoire de la vie.

En 1939, il sera mobilisé dans la section « Film & photographie » pour filmer la drôle de guerre. Il sera rapidement fait prisonnier et passera 3 ans en captivité avant de réussir à s’évader et à se cacher dans une ferme du Loi et Cher.
En 1944 il enfourchera son vélo et partira Leica en main immortaliser la libération de Paris,  puis les ruines d’Oradour sur Glane, le retour des prisonniers….Il réalisera également un film sur le rapatriement des prisonniers, Le retour.
Mais le titre de correspond de guerre, endossé par la force des choses, ne lui convient pas. Il préfère « aller humer le monde, le renifler…voir ce qui se passe » et va s’adonner avec passion au portrait entre 1945 et 1946. « Faire un portrait est pour moi la chose la plus difficile. C’est un point d’interrogation posé sur quelqu’un ».

En 1947 il est de retour à NY où le MOMA lui consacre une rétrospective (Son 1er conservateur, persuadé que HCB est mort dans un camp de prisonniers entreprend de lancer un hommage posthume, qui ne sera pas annulé avec la découverte de la « résurrection » du photographe »).

Cette même année il partira dans un périple à travers les États-Unis et cofondera (En compagnie notamment de Robert Capa) la coopérative Magnum Photos en orientant sa pratique vers le photo-reportage et en devenant photographe professionnel.
Il proposera à Robert Doisneau de rejoindre Magnum, qui déclinera l’invitation.

En 1948 il sera une des dernières personnes à voir Gandhi, une heure avant son assassinat et ses photographies des funérailles seront publiées par LIFE.
Puis il se rendra en Chine où « il sera témoin de l’effondrement de la Chine Nationaliste avant de devenir celui de la Chine communiste ».

En 1952 est publié son 1er livre « Images à la sauvette« , dont la couverture est dessinée par Matisse. Il récidive 3 ans plus tard en publiant « Les européens« , dont la couverture est cette fois-ci l’œuvre de Joan Miro.

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Durant cette même année 1955, la section des Arts Décoratifs du Palais du Louvre lui consacre une exposition: c’est la 1ère fois qu’un photographe est exposé de son vivant au Louvre.
En 1966 il annonce qu’il quitte Magnum. Il renonce à la photo, déménage et divorce d’avec sa femme. C’est également l’année où il rencontre la photographe Martine Franck qu’il épousera en 1970.

Portrait d’Henri Cartier-Bresson par Martine Franck, 1992

Rapidement il renvient à sa passion première, la peinture et le dessin et s’éteindra en 2004.

Une phrase pour terminer cet article qui me parle énormément:
« Je ne suis pas nerveux, je suis impatient. C’est tout à fait différent ».

Bonne journée et merci à ceux qui ont pris le temps de lire l’article dans son intégralité. (Is there someone? (◕‿-))

Une réponse à “HENRI CARTIER-BRESSON”

  1. Avatar de Eugenia
    Eugenia

    Un bon article, j’ai vu l’exposition il y a deux mois peut être et je revois les aspects qui m’ont interpélé.

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