Bonjour les moineaux,
Voici venu le temps du bilan mensuel de lecture.
Le mois de février s’est révélé un mois jamesien.
Venez que je vous en cause!
Ce mois-ci j’ai découvert Henry James.
Je n’ai pas suivi un de vos conseils cette fois.
Ici la faute (^^) revient à Edith Wharton. Les deux auteurs étaient très liés. Et comme j’apprécie les livres de la dame (ici), je me suis dit qu’il y avait de bonnes chances pour que ceux d’Henry James me plaisent également.
Je me suis donc lancée et j’ai commencé par Washington square (1880), un de ses premiers romans.
Ce que je vais écrire va vous étonner mais j’ai dévoré ce roman comme un polar !
M. Sloper est un éminent docteur qui exerce à New-York. Depuis la mort de sa femme, décédée une semaine après avoir mis au monde leur fille Catherine, il vit seul avec cette dernière et sa sœur, une veuve avide d’intrigues en tous genres. Catherine est une jeune fille tellement placide au cœur tendre qui, au grand désespoir de son père, ne ressemble en rien à sa mère défunte. Et le moins que l’on puisse dire et que ce dernier n’est pas tendre avec elle. Malgré son physique anodin (ce n’est pas moi qui le dit ^^), un certain Mr Townsend va s’intéresser à la jeune héritière. Pour son père, ce n’est rien de plus qu’un coureur de dot et ce dernier refuse leur union. Les raisons de ce refus sont vicieuses. M. Sloper se vante de connaitre parfaitement la nature humaine et les motivations des gens. Aussi, s’il s’oppose à cette union, c’est avant tout pour prouver qu’il lit clair dans le jeu du jeune homme. Le lecteur eut pu espérer que ce refus allait dans l’intérêt de la jeune fille qu’il souhaitait protéger. La tante quant à elle, mettra tout en œuvre pour réunir les deux tourtereaux…
Je m’arrête là car rien de pire que de spoiler un bon bouquin. Pour conclure je dirai que j’ai eu un coup de cœur pour ce roman, véritable huis clos entre les 4 protagonistes, qui m’a véritablement tenue en haleine à l’instar d’un bon polar. J’ai lu avec délectation ce récit pour le moins cynique servi par une écriture juste et parfaitement maitrisée et par un récit brillamment construit.
Un petit bijou d’ironie et de cruauté.
Portée par l’élan j’ai ouvert Les européens (1878).
Le résultat ne fut pas le même…
Un ennui léger mais persistant s’est emparé de moi.
Ce roman raconte l’arrivée d’Eugénie, Baronne de Münster et de son frère Felix en Amérique. Eugénie a épousé un prince allemand, un mariage morganatique réprouvé par le Prince régnant, frère aîné du mari. La situation de la Baronne s’en trouve pour le moins fragilisée car le roi souhaite une meilleure alliance pour son frère et veut la répudier. Elle se dit alors que c’est le bon moment pour fuir ce mariage raté et rendre visite à sa famille installée en Amérique, qu’elle n’a encore jamais vue. Le but étant d’y trouver un nouveau mari. Voilà ce qu’elle dit de cette famille: « Je n’espère pas les trouver intelligents, ni aimables – du moins au début – ni élégants, ni intéressants. Mais j’exige qu’ils soient riches, tu peux en être sûr. »
L’opposition sera franche entre la vieille Europe et ses mœurs sophistiquées et plus libérées et la jeune Amérique; entre Eugénie et Félix habitués aux mondanités et raffinements européens et leurs naïfs et puritains cousins américains. Cette arrivée va quelque peu malmener leur paisible vie de famille. Suivront badinage et marivaudage, calculs arrivistes et chassés-croisés amoureux. J’ai ici beaucoup moins ressenti l’ironie et la férocité du propos qui m’avaient tant plu dans Washington Square et la lecture de ce roman m’a quelque peu ennuyée.
Je termine avec Le tour d’écrou (1898), récit pour le moins singulier, qui se situe entre la nouvelle et le roman.
Une jeune gouvernante inexpérimentée est chargée de l’éducation de deux orphelins, Miles (10 ans) et Flora (8 ans) par leur oncle, un riche célibataire, qui ne souhaite pas s’en occuper et qu’elle ne doit contacter sous aucun prétexte. (un peu weird quand même). Si on ajoute à cela que la précédente gouvernante est décédée dans des circonstances inexpliquées qui les rendent suspectes on commence à nager dans le super weird. Super Nanny (son prénom ne sera jamais donné) va tomber immédiatement sous le charme de ces deux enfants qui semblent presque trop parfaits pour être honnêtes. Rapidement des événements étranges se produisent, et le comportement des enfants devient inquiétant. Le moins que l’on puisse dire est qu’il est difficile de parler de cette œuvre complexe où l’auteur se plait à créer le trouble en installant une atmosphère oppressante souvent malsaine et une constante ambiguïté.
C’est au lecteur de démêler le vrai du faux parmi les non-dits. L’exercice est moins facile qu’il n’y paraît. L’imagination s’emballe rapidement par le biais des nombreuses suggestions distillées avec un art maitrisé de la manipulation. Car soyons clairs, le lecteur est ici baladé et manipulé. L’auteur se plait à le noyer dans l’incertitude tandis qu’il développe une angoisse sourde en arrière-plan.
Le style narratif est plutôt complexe et la construction des phrases crée parfois des difficultés de compréhension (j’ai dû relire plusieurs fois de nombreuses phrases). L’histoire, écrite à la première personne, nous parvient par la voix de la gouvernante ce qui renforce la possibilité d’interprétations multiples.
Faut-il croire tout ce qu’elle dit? Est-elle victime d’événements étranges ou de délire hallucinatoire voire de fantasmes?
Difficile de s’y retrouver. Mais il s’agit là apparemment d’un ressort essentiel de l’œuvre d’Henry James.
C’est un récit noir, intriguant et dérangeant qui laisse le lecteur pantois et plein d’interrogations. Ce qui peut ne pas plaire.
Pour moi ce fut une étonnante découverte.
Sa lecture m’a fait penser à deux films fantastiques sortis il y a quelques années qui avaient perturbé mon sommeil pendant plusieurs semaines…
Vous voilà prévenus.
Une fois n’est pas coutume, je rajoute à ce bilan deux livres commencés mais rapidement abandonnés:
>King Kong Théorie de Virginie Despentes (ce « manifeste pour un nouveau féminisme » m’a sévèrement agacée)
>Americanah de Chimamanda Ngozi Adichie (impossible de rentrer dans l’histoire)
Un ptit conseil lecture, humm?
A bientôt!
Laisser un commentaire