En 1976, lorsque Nadia Comaneci affole les compteurs avec des notes maximales jamais atteintes, je ne suis pas encore née…
Par contre je me souviens très bien avoir regardé des dizaines de fois le film qui lui a été consacré dans les années 80’s.
De m’être extasiée sur ses performances, d’avoir eu envie moi aussi de porter un justaucorps blanc (« Comment ça maman tu ne peux pas m’acheter de la magnésie? »), de faire le grand écart facial et des trucs de fou sur la poutre et sur les barres asymétriques.
(Agrés qui me donneront des suées et des cauchemars quelques années plus tard…Et je ne vous parle pas du cheval d’arçon…^^).
Ce sont tous ces souvenirs et la nostalgie de cette période qui m’ont donné envie de découvrir ce livre.
Nadia Comaneci est une gymnaste roumaine qui réalisa des figures qui n’existaient pas auparavant et pour lesquelles les juges n’avaient pas de noms, »Elle invente alors l’impossible » et révolutionne la discipline.
Nadia Comaneci a fait rêver et a inspiré des milliers de petites filles qui vont également avoir envie de courir très vite, de réaliser des figures impossibles et de s’élancer dans le vide.
Nadia Comaneci est un petite fille incroyable de grâce & de souplesse qui défie l’apesanteur et les chiffres en détraquant les machines lorsque les juges lui accordent en 1976 la note maximale jamais atteinte, excusez-moi du peu, de 10 aux Jeux Olympiques de Montréal, alors qu’elle est âgée de 14 ans.
Nadia Comaneci va avec ces notes mettre à mal les systèmes de calcul & d’affichage, non paramétrés pour cet exploit : l’écran a d’abord affiché 1,00.
C’est sur cette incroyable performance (elle obtiendra 7 fois la note maximale lors de ces jeux) que l’auteure décide de commencer son roman, pour ensuite repartir un peu en arrière et nous expliquer comment cette toute jeune prodige a pu en arriver là.
On apprend par la suite que les choses se sont compliquées pour elle: prise de poids et transformation de son corps à la puberté, récupération de son image par le parti communiste …..
Ce n’est certes pas la première biographie sur la gymnaste mais c’est un roman très agréable à lire.
L’auteure s’est inspirée du parcours réel de la gymnaste, les faits sont exacts mais le reste est romancé.
Elle a effectué un énorme travail de recherche mais n’a jamais cherché à la rencontrer.
Le roman consiste en effet en une alternance entre le récit de la vie de Nadia Comaneci et des dialogues épistolaire imaginaires entre la narratrice et l’ancienne gymnaste roumaine devenue adulte.
Lola Lafon a fantasmé une correspondance où Nadia Comaneci commente les pages du roman, apporte des précisions sur certains évènements ou en contredit d’autres.
Le corps féminin est un des thèmes du livre. Ici un corps d’enfant gracieux asexué qui fut mythifié mais qui par son inévitable transformation en corps de femme ne va plus intéresser voire dégoûter.
« La petite fille s’est muée en femme, verdict la magie est tombée« . Voici la phrase qui va déclencher chez l’auteur l’envie d’écrire sur cette enfant et de s’interroger sur cette violence faite à l’encontre du corps féminin devenu adulte.
La confrontation est/ouest constitue un autre des thèmes du livre. (L’auteure a vécu elle-même en Roumanie et en Bulgarie durant la première partie de sa vie).
A travers le récit de l’ histoire de Nadia Comaneci on suit également l’évolution politique de son pays, la Roumanie.
La difficulté rencontrée par Lola Lafon était de ne pas pencher d’un côté politique ou d’un autre, de ne pas donner d’opinion.
Sa volonté n’était pas de faire un roman à charge contre Ceausescu car les gens connaissent l’Histoire.
Sa volonté était de tenir un équilibre délicat soit dénouer les idées toutes faites sur les pays de l’est sans pour autant nier les faits terribles (Interdiction de l’avortement, rationnement alimentaire, censure, contrôle des menstruations…).
Ce livre n’est pas seulement le récit de l’enfance d’une gamine de l’est mais également celui d’une icône d’un pays communiste, marionnette du pouvoir au cœur de la guerre froide.
L’auteur n’omet pas de mentionner l’ambivalence de son héroïne et après sa gloire fulgurante, nous décrit également l’anonymat et la déchéance.
Le style est rythmé, juste & direct, la plume est alerte. Le livre se dévore.
C’est à peine si l’on a le temps de s’apitoyer sur le sort de cette gamine, sur son corps meurtri. De toute manière ce n’est pas le propos.
On sentirait presque l’odeur de la magnésie, celle de la transpiration, on entendrait presque les os craquant sous l’effort et surtout on tremble pour Nadia lorsqu’elle exécute des figures périlleuses.
Qui a dit qu’elle ne souriait jamais, humm?
A bientôt!
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